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dimanche 2 mars 2014

AspieGlotte je fus, AspieGlotte je suis, AspieGlotte je serai ! 3 sur 10

1. Flashback (suite)

B Les années «gymnase» (lycée) 




J'ai bien évidemment gardé la préparation de mes oraux de latin et de grec pour l'obtention de ma matu type A en 1985, au gymnase français de Bienne, telle quelle. Intérêt spécifique oblige...
J'ai bien évidemment gardé la préparation de mes oraux de latin et de grec pour l'obtention de ma matu type A en 1985, au gymnase français de Bienne, telle quelle. Intérêt spécifique oblige...

Mon récit se poursuit par celui des difficultés d'apprentissage que j'ai connues durant cette période. Si j'ai effectivement réussi mon cursus gymnasial pour en ressortir avec ma matu de type A en poche (NB. la matu désigne le certificat de maturité, ie le bac en France), mon ressenti, lui, est tout autre. Ce fut pour moi trois années extrêmement difficiles, sur tout les plans. 




Je pensais, en entamant la rédaction de ce volet, m'arrêter sur quelques défis que j'ai eu à relever dans la langue écrite, et plus particulièrement en français. C'est alors que de nombreux souvenirs, profondément enfouis, se sont mis à jaillir de ma mémoire. C'est la gorge serrée et le cœur lourd que j'y ai travaillé. 


Manifestement, je n'ai pas fait la paix avec cette période de ma vie ! J'aurais pu m'en douter si seulement j'avais prêté plus d'attention à ma vie onirique ! Bien que j'aie ma matu depuis presque 30 ans, mes nuits sont fréquemment hantées par un rêve récurrent : je n'arrive pas à préparer mes examens de maturité.... Comme si, dans mon inconscient, je n'avais jamais intégré la sensation d'avoir décroché ce précieux sésame pour les Universités. 

Deux ans après cet événement, alors que je consultais en raison d'une dépression qui restait chevillée à mon corps depuis mes 16 ans, et parce que j'étais réellement en échec cette fois-ci, il m'avait été impossible d'expliquer à ma psychothérapeute pourquoi je m'étais sentie si triste le soir de la remise des certificats de maturité. En effet, moi aussi j'étais de la fête, j'y avais ma place, peut-être même plus que les autres si j'en crois les propos de l'une de mes camarades : «De nous tous, c'est toi qui la mérite le plus». Cette dernière pensait sans doute me faire un beau compliment en louant l'une de mes qualités, qualité typique des aspies du reste, à savoir ma persévérance. Elle ne se doutait certainement pas que ces propos, sensés me faire plaisir, me blesseraient. Sans le savoir, elle m'avait renvoyée ma différence en pleine figure : pour arriver au même niveau que les autres, je devais bosser comme une forcenée : «Ils sont tous plus jeunes que moi et n'ont pas eu besoin de passer des nuits blanches pour y arriver. Conclusion : je suis nulle». 

Pour en revenir à la question de ma psychothérapeute : «Pourquoi vous êtes-vous sentie triste lors de la remise de votre certificat de maturité ?», j'ai été incapable de lui répondre. Comme souvent d'ailleurs. Elle m'avait justement fait remarquer qu'elle devait souvent me tirer les vers du nez. Parler de mes sentiments m'était alors presque impossible. 

Et pourtant, la réponse était d'une simplicité enfantine... Je n'avais pas eu l'impression d'avoir réussi ! C'est cet engramme qui est resté figé dans mon cerveau sans que je ne me le sois verbalisé. 

Ce n'est que ce soir de mars 2014, m'apprêtant à mettre un point final à cet article, que je peux enfin mettre cette sensation en mots. 

C'est aussi ce qui explique pourquoi j'ai ressenti cette même sensation d'oppressement chaque année en feuilletant la nouvelle revue des actuels gymnasiens, revue que je reçois comme tous les membres de l'Angybie qui réunit les anciens élèves du gymnase français de Bienne. Il est temps que je lâche cette idéalisation des autres, des «neurotypiques» qui ont représenté, bien trop longtemps, ma course vers l'inaccessible. 

Il aura fallu ceci pour que je puisse enfin identifier la nature de ce sentiment... et en cerner l'origine. 

Puisse le diagnostic m'aider à faire la paix avec moi-même, à mieux m'accepter, et accepter que oui, ce qui était aisé et normal pour mes condisciples neurotypiques était bel et bien difficile pour moi, voire même encore hors de ma portée à l'époque. 

Qui sait, peut-être serai-je apte, un jour, à achever la lecture du chapitre dédié au Vilain Petit Canard qui me bouleverse tant dans le magnifique livre de Clarissa Pinkola Estés...


Comment pouvais-je me sentir une appartenance parmi les neurotypiques quand les cygnes que je cherchais étaient des aspies ? Merci à vous, Laurent Mottron, pour ce que vous écrivez ici :


«La place sociale d’un TEDSDI (Trouble Envahissant du Développement sans Déficit Intellectuel) s’acquière d’abord en tant que porteur d’un diagnostic. Celui-ci équivaut pour eux à un véritable baptême, à une véritable entrée dans une communauté de semblables. La collectivité dans laquelle ils se reconnaissent, la réalité subjective qu’ils partagent, c’est celle de leur spécificité par rapport aux non autistes. Ils ne se reconnaissent peu ou pas comme humain social, ils se reconnaissent comme autistes. Leur identité passe par leur particularité. Leur donner un diagnostic, c’est leur permettre de se reconnaître comme humain. Le diagnostic, que les lieux communs d’une certaine psychiatrie voient encore comme une «étiquette» invalidante et deshumanisante, est en réalité le moyen pour les personnes atteintes d’accéder à leur premier véritable groupe, celui des gens qui leur ressemblent, et qui ont un nom dans le discours scientifique». 
Mottron, L. (2004). L'autisme, une autre intelligence : Diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle. Paris : Mardaga, p. 32
Gymnase français de Bienne. Mon gybus (= bahut ou Athénée) lol



Durant ces trois ans, j'étais dévorée d'angoisse. Sans la moindre compréhension sur la nature de tous mes troubles, j'avais commencé en plus à souffrir, et ceci depuis ma 9ème année (la 3ème donc), de crises paroxystiques d'angoisse (ou attaques de panique). Cela me prenait n'importe quand, parfois même plusieurs fois par jour. 



À tout moment, je devais quitter la salle de classe. L'un des facteurs déclanchant de ces crises n'était autre que ma surcharge sensorielle. L'air conditionné de ces locaux y tenait une grande place. Il circulait un air glacial devant les fenêtres, air qui ne se renouvelait pas suffisamment pour autant. Les odeurs stagnaient et certains mélanges m'étaient bien difficiles à supporter. Lors de certains cours, je choisissais ma place non pas pour être capable de lire au tableau, mais pour m'éloigner autant que faire se peut de l'une de mes prof qui parfois me semblait être tombée pieds joints dans sa fiole de parfum. Malheureusement, le prof suivant arrivait avec une pipe chargée de tabac, éteint certes, mais ceci n'empêchait pas que la classe s'imprégne de ce méli-mélo odorant. À cette agression olfactive s'ajoutait la lueur des néons qui se réfléchissaient sur les pages glacées de certains manuels, à l'instar de mon «Lagarde et Michard» (manuel de littérature française). J'échangeais mon livre avec le vieil exemplaire que l'une de mes camarades détenait de sa mère, et dont les pages étaient mat. Le bruit... aussi était un facteur de stress. 



La peur de ne pas y arriver, la réduction de mes heures de sommeil - j'essayais de travailler la nuit car tout me prenait énormément de temps, - alors que mon sommeil n'était déjà pas réparateur (si au moins mon syndrome des jambes sans repos avait été diagnostiqué - et traité ! – à défaut du reste !)...


J'avais d'immenses difficultés pour suivre dans de nombreuses matières. J'aurais plus tôt fait d'énumérer celles qui ne me posaient pas de difficultés. Il y en avait, heureusement : les maths, la chimie, la physique et la musique. Voilà qui était plutôt saugrenu pour une élève inscrite... en section classique ! 4 branches faciles contre 7 qui me demandaient beaucoup d'efforts. Le français, le latin, le grec partageaient avec les maths un coefficient 2. Pour le reste, il y avait les coeff 1 : l'allemand, la biologie, l'histoire, la géo avec les branches qui allaient bien : la chimie, la physique et la musique. À ma très grande chance la gymnastique ne comptait pas (la philo non plus étonnement) et je n'avais pas de dessin, qui était à choix avec la musique. 

Que faisais-je en section classique ? «Que foutez-vous en littéraire ? Pourquoi ne demandez-vous pas votre transfert en section scientifique ?», m'interpela un jour ma prof de maths à la sortie d'un cours. C'est vrai que dans cette matière j'étais plutôt une locomotive dans ma classe ! J'y ai réfléchi avec elle. Mais j'ai vite fait de renoncer à ce projet, simplement parce que cela impliquait de rattraper deux ans d'anglais (le grec ancien avait été choisi à la place deux ans plus tôt) et... la géométrie descriptive... Ce qui impliquait une capacité de représentation en 3D que j'étais loin, très loin de maîtriser (j'avais eu une sensibilisation l'année précédante et avais dû me battre contre des lignes de rappels à dessiner. Je devais passer par des équations afin de calculer des coordonnées, méthode dans laquelle j'étais très à l'aise certes mais qui prenait bien plus de temps que celui qui est requis pour esquisser des lignes de rappel).

L'une de mes autres difficultés consistait à prendre des notes de cours. Mission impossible. Les phrases s'échappaient. Impossible de les garder en mémoire le temps de les écrire. J'ai mieux compris cette impossibilité lorsque, bien des années plus tard, un examen orthophonique a révélé mon trouble phonologique (un peu moins grave qu'une dyslexie phonologique) et une surcharge cognitive à l'écrit comme à l'oral). Dans l'item «Répétition de phrases complexes» : mon niveau est pathologique (inférieur à 11 ans) ! Cela explique pourquoi j'ai dépendu, tout au long de mes études, des notes de mes camarades. Surtout que mon graphisme devient vite maladroit si je dois écrire vite, ce qui me fait me perdre beaucoup temps. Avec un ordinateur portable je m'en serais bien mieux sortie. 

Comment ne pas me sentir en décalage avec les autres ? «Tous les autres y arrivent, sauf moi» voilà la phrase toxique que je me répétais sans cesse... Si les étiquettes peuvent être enfermantes, l'absence de diagnostics, surtout pour qui a plusieurs comorbidités comme moi, est bien plus délétère sur le plan de l'estime de soi qu'une étiquette. De toute manière, des étiquettes, nous en recevons : «Elle ne peut jamais rien faire comme les autres», «elle est têtue, tout le monde lui dit qu'elle n'est pas capable de faire des études mais elle s'entête» De très nombreux aspies le paient par des épisodes dépressifs majeurs (ce qui fut mon cas et cela a commencé lors de ma pré-adolescence) ainsi que des troubles anxieux importants. 

Allemand : intégration auditive

Durant mes cours d'allemand, mon trouble d'intégration auditive m'empêchait tout bonnement de prendre part aux discussions. Je me demande comment j'ai fait pour dissimuler le fait que, bien souvent, je n'avais aucune idée du thème à l'ordre du jour puisque tout le monde s'exprimait dans la langue de Goethe ! Je ne parvenais pas à découper la suite ininterrompues de phonèmes qui pour moi n'étaient que bouillie de sons indistincts. Je réussissais juste à maintenir la moyenne grâce à mon excellente connaissance de la grammaire. Comme toujours je pouvais compter sur ma compréhension de l'ossature de la langue, et je me rattrapais dans les thèmes.

Français : l'abstrait...

En français, c'était une autre histoire. Ah ces matinées (une fois par semestre) où tout le gymnase avait une dissertation de 4h ! Très nettement insuffisant pour moi. J'étais dans un état de tension ineffable. 

Tout le monde avait l'habitude de me voir tressaillir au moindre bruit. Mais durant ces 4h, toutes mes réactions étaient exacerbées. Nous pouvions bien sûr sortir pour aller au WC, et mes camarades fumeurs sortaient une fois ou deux pour en griller une... Pas de souci lorsque mes camarades sortaient de classe. Mais il en allait autrement lorsqu'ils revenaient puisque dans ce sens, il m'était impossible d'anticiper l'ouverture de la porte. Nous sortions tous environ 2 fois. Pour moi, cela représentait envrion 25 à 30 sursauts en 4h, sursaut allant crescendo. En fin de dissertation, j'étais au bord des larmes que mes fou-rires dissimulaient mal. À l'issue de l'une de ces matinées où je n'avais réussi à écrire qu'une seule et unique phrase, mon prof de classe, qui nous avait surveillé, m'avait renvoyée chez moi pour récupérer, constatant que j'étais à bout de forces nerveusement et pas en état de supporter un après-midi de cours. Il m'avait même demandé si j'avais besoin que l'on me raccompagne à la maison. Ce que je n'ai pas osé accepter, gênée de m'être mise dans un état pareil. Mais j'ai été très touchée par sa sensibilité... 

Heureusement pour ma moyenne, nous avions une autre dissertation, à effectuer à la maison. Je ne comptais pas les heures, une vingtaine en tout cas pour rédiger une dissertation potable. À un moment, je ne sais plus quel était le thème que j'ai choisi, mais c'était en lien avec la tragédie comme genre littéraire. Au même moment, en grec, nous avons abordé Aristote et la théorie de la catharsis. J'avais saisi mon sujet. Il était temps de prouver à ma prof de français que je n'étais pas complètement décérébrée. Et... ô surprise, ça a fonctionné ! Lors de la restitution, elle avait l'habitude de lire la meilleure dissertation par thème. Et cette fois, c'est la mienne qui fut lue. Wow ! De plus, cette fois-ci, pour qualifier le style, au lieu du traditionnel «style correct» auquel j'étais abonée, j'ai obtenu un «style aisé». Ce fut un véritable saut quantique. 

À ce moment-la, pour les dissertations à domiciles, je suis passé du presque rien au tout, comme j'en étais la spécialiste. 

Il faut dire que même si je n'étais pas encore particulièrement à l'aise dans l'écriture, je nourrissais le rêve, inacessible, d'écrire. J'aurais tant adoré avoir des talents d'écrivain ! J'aime la créativité que nous offre le langage. Malgré mes difficultés du moment j'ai voulu, pour l'une de mes dissertations, introduire un interlocuteur fictif. Sauf que cela n'a pas été au goût de ma prof qui m'a reproché un manque de modestie... Eh oui, pour elle je n'avais les talents nécessaires pour me servir de la «maïeutique socratique». Euh.. il y avait juste une petite confusion, que j'ai tenté de lui expliquer : «Mais non Madame ce n'est pas de la maïeutique – même si j'ai utilisé le "tu" pour introduire cet interlocteur fictif – c'est de la diatribe ! (Empr. au bas latin diatriba «entretien, discussion» (gr. διατριϐή «passe-temps, conversation!» et en partic. «entretien philosophique». Elle n'aimait pas non plus que l'on «veuille introduire de la complicité avec le lecteur».

Je ne m'en sortais pas forcément mieux en analyse de textes qu'en dissertation. Parfois, mon souci c'est que cela devenait trop abstrait. Comment appréhender certains essais tels que «Noces» de Camus ? Pire encore, le théâtre de l'absurde ? Non seulement je n'ai rien compris au fameux «En attendant Godot» de Samuel Beckett, mais en plus cette œuvre eut un véritable effet anxiogène sur moi. J'étais supposée lire ce livre à domicile mais j'en ai été purement et simplement incapable tant l'angoisse m'étraignait à chaque nouvelle tentative. Aucun sens. 

Cette difficulté se reproduisit pour la préparation de mon oral de maturité. Nous devions choisir un auteur avec un certains nombre de lire à préparer. Mon choix se porta sur Honoré de Balzac. Dans la liste imposée, il y avait : «Le père Goriot», «Eugénie Grandet» et «Illusions perdues». Mais allez savoir quelle mouche a piqué ma prof, lorsque je lui ai communiqué mon choix, elle m'ajouta un livre : «Peau de chagrin». Ce roman philosophique fut encore pire que la pièce de Beckett. J'ai bien tenté de convaincre ma prof de renoncer à ce livre qu'elle a ajouté après coup mais elle n'a rien voulu entendre. Évidemment je ne lui ai pas dit pourquoi je tenais tant à ce qu'elle annule cette lecture. Ce livre était si angoissant, et si déprimant que j'ai pris une décision bien risquée. J'ai fait l'impasse. 28 ans et demi plus tard, il y a prescription :-) J'ai pris le risque de tomber sur ce livre à l'oral et l'aurais d'ailleurs payé de ma matu. Je n'ai vraiment pas pu faire autrement. Heureusement pour moi, cela se solda par un «Happy End». Je suis tombée sur un passage d'Eugénie Grandet. Je n'ai jamais compris ce qui s'est passé mais en salle de préparation, j'ai eu une inspiration subite. Au point quelques minutes plus tard, d'entendre la voix de ma prof, tout sourire, me dire «Mais Denise, je suis tout ouïe !». C'est cet oral qui clotura mes examens YES ! Réussi !

Latin & grec

Pourtant, j'avais bien commencé, avec ces branches en première année... Nous n'avons pas enocre de version, juste de la grammaire. Mon prof de latin m'avait traitée d'encyclopédie sur pattes lors de mon premier oral la première semaine. «Ça ne va pas durer, Attendez qu'il y ait la version !» m'étais-je dit. Étonnamment mon prof de grec, lui m'a traitée de dictionnaire ambulant le landemain... même pensée de ma part... 

Je reviens à l'oral de matu. J'eus beaucoup moins de chance que pour celui de français... Comme je le disais plus tôt, en version latine, et pire en version grecque, j'étais... nulle. Or, c'est ce que nous avions à l'écrit de matu pour ces deux branches. Durant mes 6 semestres, je n'ai jamais réussi à obtenir la moyenne. En latin, je remontais ma moyenne avec les épreuves de grammaire. Mais en grec, même en multipliant les 6 sur 6, en grammaire, je ne parvenais pas à compenser les naufrages de ces maudites versions. Je travaillais comme une malade pour les interrogations orales, - fréquentes puisque nous n'étions que 4 élèves, le tournus était vite fait-. Mon prof m'adressait toujours les mêmes critques jusqu'à un moment de déclic en dernière année : «En technique, vous êtes parfaite. Mais en analyse de texte, vous avez de la peine, vous ne finissez même pas vos phrases».

Dans ces conditions, j'étais assez mal partie pour les examens finaux. À l'écrit, je devais m'attendre à une note très insuffisante puisque comme je le disais, c'était une version qui m'attendait. À l'oral, c'était une analyse de texte basée sur l'extrait de l'un de nos deux thèmes (300 lignes de prose ou vers par thème). N'ayant choisi que des vers, et en latin, et en grec, je devais enplus être capable de les scander. 

Il fallait que je me montre incollable sur la grammaire de mes texte, sache analyser le style et me livrer à une interpération de texte. Comme je devais être prête à compenser la catastrophe qui ne manquerait pas à survenir à l'écrit, je devais tout miser sur l'oral. J'ai donc travaillé comme une malade, visant... le 6 sur 6 à mes deux oraux. Exiger ça de moi était pure folie. En travaillant avec plusieurs traductions (il m'en fallait une qui soit très littérale, le plus possible, et autre avec un beau style), ma vitesse de croisière était de 10 vers de l'heure... En gros, cela représentait 120h de travail pour ces deux oraux cumulés. 

En dernière année, à la faveur d'une excellente interpération de texte que j'avais faite en grec, sur du Solon, mon prof a commencé à me considérer autrement. J'ai d'abord eu à le convaincre que ce travail était iben le mien, tant il était qualitativement supéireur à ce que j'avais fait plus tôt. J'ai commencé à obtenir de bien meilleures résultats. J'étais donc bien plus assurée., il fallait juste que je bosse énormément. 

Je ne suis pas passé loin de ce 6 attendu en grec... Quelle déception ! J'ai échoué à la seule question de grammaire que j'ai eue. Pour une broutille ! Le prof m'a questionnée sur une expression contennat le nom d'une divinité très secondaire. Dans l'édition de Belles Lettres avec laquelle j'avais travaillé, elle était reconnaissable grâce à son initiale en majuscule. indice supprimé dans le texte que j'ai eu pour ma matu. J'ai une mémoire photographique et c'est ce qui m'a joué un mauvais tour.

Mauvaise compréhension du langage non verbal, des sous-entendu et de l'ironie...

En revanche la veille, en latin, j'ai eu beaucoup moins de chance. Après m'être fait souhaiter un bon anniversaire, j'ai pensé avoir fait du bon boulot. Mon prof me souriait, m'avait félicitée. Pour moi, c'était évident, il était content ! Du moins c'est ce que je cru naïvement. J'ai déchanté le jour où j'ai reçu ma note... elle était insuffisante. 

Cette incapacité à déchiffrer correctement le langage non verbal, de dépister un ton sarcastique ou ironique est bien un symptôme du SA. Symptôme dont je n'avais aucune conscience. C'était encore plus fort dans cette situation déjà exigeante où je devais à la fois commenter un extrait en latin (des vers de l'Énéide de Virgile - mon prof tenait absolument à ce que je prenne position devant le dilemn auquel devait faire face Énée qui devait choisir entre la raison de l'État et celle de l'Amour. J'étais incapable de me déterminer. Pas de bol, j'aurais préféré être interrogé sur Phaéthon). Je devais en outre donner des réponses correctes sur la langue, comprendre et analyser le langage verbal et non verbal de mon prof, tout en tenant compte de la présence de l'expert que je ne connaissais pas. Trop de paramètres à gérer simultanément. Je reprends ici un passage de mon bilan sensori-moteur (cf. L’Odyssée d’une aspergirl presque quinqua en quête d’un vrai diagnostic différentiel : 1. Intégration sensorielle) : 

«Mme ... est en double tâche dans ces moments là et la relation avec l’autre dans ces moments là risque d’être difficile. Elle doit gérer en même temps les aspects sensoriels (puisque c'était ce qui était testé à ce moment là... Ma tâche en l'occurence était le sujet d'examen sur lequel je devais me concentrer) et les aspects d’attente de la part de l’autre ce qui peut donner un aspect particulier au niveau relationnel et émotionnel (...) L’aspect en double tâche que j’évoque plus haut est un élément important à prendre en compte si on veut interpréter correctement ses réactions affectives parfois décalées. Mme ... cumule les tensions qui se libèrent dans des moments parfois éloignés de la situation. La représentation d’un événement tarde à se faire à cause de l’émotion qui la submerge probablement, d’où une réaction "après-coup"».
Compte rendu de mon bilan sensori-moteur

Dans un tel contexte, plus encore eu égard à l'importance de l'enjeu, j'avais bien moins de probabilité de décoder correctement le langage non verbal de mon professeur de latin que dans n'importe quel contexte...


Mais je l'ai eue, ma matu ! 

Le soir de la remise des diplômes, le vendredi 13 septembre 1985, après ma joie initiale d'avoir réussi, je constatais au vu de mon résultat à l'oral de latin que mon prof s'était doucement foutu de ma g. avec son air de me féliciter, je me suis sentie bien ridicule.

En grec, alors que j'ai si bien réussi mon oral, mon prof m'a dévalorisée pour mon écrit puisque comme c'était à prévoir, j'ai bien évidemment complètement raté la version. Pas un mot sur l'oral qui avait été ma meilleure prestation lors de ces examens si difficiles et stressant pour moi. 

La seule qui m'ait vraiment touchée, fut la rectrice du gymnase. La salle des maître étant vitrée, elle m'avait repérée assise sur un banc, en train d'attendre que leur réunion soit terminée pour communiquer les résultats à ceux qui étaient présents. Je la verrai toujours sortir de la salle des maître, marcher dans ma direction, m'adressant simultanément ces mots : «C'est officiel, vous avez réussi», puis arrivée à ma hauteur, elle est venue m'embrasser. 

Le soir, quelques heures plus tard, lors de la remise des certificats, j'avais pris quelques couleurs à l'entendre. 

Un autre événement, c'est vrai, m'avait assombrie. Normalement, avec beaucoup d'humour, enfin, il paraît, les étudiants qui avaient obtenu leur maturité avec le minimum, 60 points, soit 4 de moyenne (sur 6) se voyaient décerner «le prix de l'équilibrisme» et se faisaient appeler au même titre que ceux qui recevaient leur prix d'excellence, dès 80 points et plus (sur 90). Ils ont appelé 3 étudiants pour le prix d'équilibrisme. Mais en réalité, nous étions 4. J'ai obtenu, moi aussi, 60 points. Mes profs ont pensé (juste !) que me le décerner à moi aussi m'aurais trop affectée. Non, chez moi l'équilibrisme n'était pas un sport du minimalisme cultivé au cours de ces 3 années de gymnase. Mais que l'on m'ait épargné ne changeait pas énormément la donne. Je savais, moi, que j'avais également tout juste réussi !

Mon oral de grec, Matu type A, 1985 au gymnase français de Bienne. Oral où j'ai «sauvé l'honneur» en tombant sur mon sujet préféré : l'amitié entre Achille et Patrocle dans l'Iliade. J'aurais cependant préféré le chant XVI au chant XVIII...
 Mon oral de grec, Matu type A, 1985 au gymnase français de Bienne. Oral où j'ai «sauvé l'honneur» en tombant sur mon sujet préféré : l'amitié entre Achille et Patrocle dans l'Iliade. J'aurais cependant préféré le chant XVI au chant XVIII...
Mon choix pour les 600 vers à travailler pour mon oral de grec, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne (hexamètre dactylique pour Homère / trimètre iambique pour Euripide).
Mon choix pour les 600 vers à travailler pour mon oral de grec, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne (hexamètre dactylique pour Homère / trimètre iambique pour Euripide)
Premiers vers du chant XVI de l'Iliade... Amitié entre Achille et Patrocle, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne. Sous l’approbation de ma tricolore, Euterpe (Muse de la musique).
Premiers vers du chant XVI de l'Iliade... Amitié entre Achille et Patrocle, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne. Sous l’approbation de ma tricolore, Euterpe (Muse de la musique).
Iphigénie à Aulis d'Euripide, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne.
Iphigénie à Aulis d'Euripide, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne.
Mon fameux oral de latin. Matu type A, 1985 au gymnase français de Bienne. Je suis tombée sur Énée et Didon. Je souhaitais tellement parler de Phaéthon...
Mon fameux oral de latin. Matu type A, 1985 au gymnase français de Bienne. Je suis tombée sur Énée et Didon. Je souhaitais tellement parler de Phaéthon...
Mon choix pour les 600 vers à travailler pour mon oral de latin, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne (hexamètre dactylique tant pour Virgile qu'Ovide).
Mon choix pour les 600 vers à travailler pour mon oral de latin, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne (hexamètre dactylique tant pour Virgile qu'Ovide).
Phaéthon, Les Métamorphoses d'Ovide, livre II, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne.
Phaéthon, Les Métamorphoses d'Ovide, livre II, préparation de ma matu type A, 1985, gymnase français de Bienne.

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